Contrôle de l’économicité des médecins par santésuisse
Christophe Kaempf | Resp. Relations publiques Suisse romande, santésuisse
La nécessité de juguler l’augmentation des coûts de la santé reste un perpétuel sujet d’actualité. Il en va notamment de la responsabilité des acteurs du domaine de la santé de respecter la LAMal et les dispositions contractuelles (notamment le TARMED).
Conformément à l’art.56 al.6 LAMal, « les fournisseurs de prestations et les assureurs conviennent d’une méthode visant à contrôler le caractère économique des prestations ». Jusqu’à fin 2016, la méthode ANOVA (comparaison nationale qui tient compte principalement de l’âge et du sexe du patient) prévalait. Cette méthode avait remplacé la RSS (division des coûts par le nombre de malades avec une comparaison cantonale). La nouvelle méthode de screening – dite de régression – a été appliquée pour la première fois pour l’année statistique 2017.
Ainsi, l’analyse de régression est un développement de la méthode ANOVA, elle-même reconnue depuis des années par la jurisprudence.
Méthode de régression
La méthode de Régression a fait objet d’un contrat (convention des 10 juillet, 15 août et 23 août 2018) dont les parties signataires sont la FMH, santésuisse et Curafutura. Elle a également été validée en 2019 par le Conseil fédéral qui relève ce qui suit : « Tarifsuisse SA propose et effectue par ailleurs une « évaluation de l’économicité », qui consiste à évaluer les coûts moyens par malade d’un fournisseur de prestations par rapport à un groupe de référence en se fondant sur la banque de données (« pool de données ») des assureurs-maladie. […] cette méthode a été perfectionnée ces dernières années. Elle prend désormais la forme d’une analyse de régression en deux étapes et a été complétée par d’autres facteurs de morbidité. Santésuisse, Curafutura et la FMH ont signé l’été 2018 une nouvelle convention relative à l’application de la méthode perfectionnée. »*
Un médecin est ainsi comparé avec un collectif de référence national, constitué de confrères de même spécialité. Si son indice de régression du total des coûts par patient dépasse la valeur de 120/130 (100 étant la moyenne), le fournisseur de prestations est considéré comme statistiquement « hors normes ».
Le dépassement des indices démontré par la méthode statistique constitue cependant la présomption qu’une pratique n’est pas économique. Ainsi il appartient au médecin de renverser cette présomption en démontrant les particularités de sa pratique justifiant des coûts plus élevés que ceux du groupe de comparaison. Une analyse individuelle est alors réalisée lors de laquelle les éventuelles particularités de la pratique du médecin sont prises en compte. Faute d’éléments probants, la méthode peut suffire à elle seule à prouver la polypragmasie.
santésuisse comme membre de la Commission paritaire
Dans le canton de Neuchâtel, les dossiers de médecins filtrés pour une année statistique spécifique sont présentés à l’ensemble des membres de la Commission paritaire, dans laquelle siègent des représentants des médecins et des assureurs-maladie. Une analyse individuelle de chaque cas est réalisée, en lien avec la statistique et la pratique du médecin concerné. Ce dernier est invité, par courrier, à expliquer la hauteur de ses indices et à justifier le dépassement de l’indice de régression.
Exception faite des rares cas graves de polypragmasie avérée, le médecin filtré dispose d’un certain temps pour influencer ses coûts à la baisse afin d’amener ses indices à la norme. Si tel n’est pas le cas même après plusieurs interpellations et consultations entre membres de la Commission paritaire, les assureurs-maladie – représentés par santésuisse – se réservent le droit de déposer une demande de rétrocession et d’ouvrir une procédure devant la Commission paritaire respectivement devant le Tribunal arbitral si la tentative d’entente extrajudiciaire devait se solder par un échec.
Les représentants du département Evaluation d’économicité de santésuisse tiennent à souligner la qualité des échanges et la cordiale collaboration avec les membres de la SNM lors des séances de Commission paritaire où sont discutés les cas des médecins neuchâtelois filtrés.
Lien: https://tarifsuisse.ch/fr/nos-services/management-des-prestations/evaluation-deconomicite/
*(cf. Message concernant la modification de la loi fédérale sur l’assurance-maladie, FF 2019 p. 5765 ss, spécialement pp. 5777 et 5778)